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Ce qu’on peut faire (ou pas) avec une Switch hackée
Si toutes les consoles majeures sont plus ou moins hackables à un moment de leur histoire, la Switch n’a pas résisté bien longtemps. En effet, le homebrew, c’est-à-dire l’exécution de programmes non-officiels, a été possible assez tôt dans la vie de la machine, et dans son sillage, le piratage de jeux commerciaux.
À ce sujet, il faut bien faire la différence entre « hacker » et « pirater ». En anglais, « hacker » veut dire utiliser un objet de manière détournée. Vous utilisez un trombone pour autre chose que tenir des feuilles de papier ensemble ? C’est un hack. Vous vous grattez l’oreille avec un stylo ? Hey, mais vous êtes un hacker. Contrairement au piratage, le hacking n’a pas forcément de connotation négative. En français, on fait souvent l’amalgame entre ces deux termes, à tort. D’ailleurs, la team ReSwitched, qui regroupe les principaux hackers Switch, est anti-piratage, et leur Custom Firmware Atmosphere ne permet tout simplement pas de lancer des copies de jeux commerciaux. Après on est d’accord, personne n’est dupe sur la raison principale qui pousse les gens à hacker leur console. Il est évident aussi que sans hacking, pas de piratage. C’est juste qu’il faut bien faire la différence entre ces deux termes, qui ne désignent pas la même activité, ni les mêmes personnes.
Dès les premières versions des firmwares Switch, des failles ont été découvertes, utilisées, puis patchées progressivement par Nintendo. Mais c’est surtout la faille dans la bootrom du Tegra X1, début 2018, qui a permis à la scène de passer au niveau supérieur. En effet, cette vulnérabilité est au niveau hardware, ce qui la rend non patchable par une mise à jour firmware. Merci NVidia ! La seule manière pour Nintendo de la corriger, c’est de sortir une nouvelle version matérielle de la console …ce qu’ils ont fait aux alentours de septembre 2018. En gros, si vous avez une Switch qui date d’avant l’été 2018, elle est sans doute hackable, mais à partir de cette date, ça sera de moins en moins probable. Si vous en cherchez une aujourd’hui dans cette optique, vérifiez bien le numéro de série avant.
Avant de parler de toutes les portes qu’ouvre le homebrew, il faut d’abord évoquer celles qui se ferment, car il y en a, et pas des moindres.
Évidemment, Nintendo est très actif pour lutter contre toute forme de hacking. La Switch contient des mécanismes de télémétrie solides, qui font que Nintendo peut détecter une exécution de homebrew, présente ou passée, et agir en conséquence dès que la console se connecte au réseau. Ainsi, toute console exécutant ou ayant exécuté du homebrew sera inévitablement bannie un jour ou l’autre si elle se connecte. Ce n’est pas forcément immédiat, ça peut arriver plusieurs semaines plus tard, mais ça arrivera. Il n’y a aucun moyen d’éviter ça à l’heure actuelle, à moins de ne plus jamais connecter sa console, ce qui revient au même.
Donc quand on prend la voie du homebrew, il faut tout de suite faire une croix sur le jeu en ligne, l’eShop, les mises à jour (sauf quand ça arrange Nintendo…), et tout autre service en ligne.
Si on ne peut pas avoir à la fois le homebrew et le jeu en ligne, il reste néanmoins un moyen de faire marche arrière tant que la console est restée déconnectée : restaurer un backup de sa NAND « propre », c’est-à-dire sans aucune trace de homebrew. D’où l’importance de créer un backup de sa NAND (= mémoire interne) avant toute chose. Ainsi, la console reviendra dans son état initial, avant le homebrew. C’est contraignant, long (32 Go à chaque fois), mais possible.
Logiquement, la garantie ne s’applique plus lorsque vous faites une utilisation non conforme du produit. Donc si votre console a un problème, il faudra pas venir chouiner après…
Alors qu’officiellement, on n’a droit qu’à deux pauvres thèmes tristounes, les possibilités offertes par le homebrew dans le domaine sont très vastes : on peut mettre une image de fond bien sûr, mais aussi changer toute la disposition des icônes (sur deux lignes par exemple), des sons, mettre des images dans les menus, etc.
Pendant longtemps, il n’y a eu aucun moyen officiel de faire un backup de ses sauvegardes. En cas de problème, on pouvait perdre nos 200h de Zelda du jour au lendemain. La situation a un peu changé avec l’abonnement en ligne, mais le cloud c’est payant, et ça ne vaut pas un backup local. Il existe depuis longtemps des outils homebrew permettant de faire des backup, de les stocker quelque part, et de les restaurer éventuellement. On peut aussi utiliser ce système pour importer une sauvegarde externe, par exemple pour tout débloquer dans un jeu sans s’embêter.
Vous voulez débloquer tous les persos de Smash tout de suite en gardant le reste intact ? Vous voulez gagner quelques niveaux à Octopath Traveler, ou acheter les derniers costumes de Mario Odyssey sans passer des heures à grinder ? C’est possible. Il existe des éditeurs de sauvegarde pour ça. Tous les jeux ne sont pas supportés car il faut que quelqu’un renseigne les offsets à la main, qui sont spécifiques à chaque jeu. Mais la plupart des gros titres le sont.
Que ce soit dans Skyrim, Breath of the Wild ou autres, il est possible d’intégrer des mods à la Switch. Par exemple, pour jouer avec Linkle :
Si si, sérieusement. Enfin, il y a un truc. Une application homebrew permet de streamer n’importe quel jeu PC vers la Switch. La manette Switch est alors reconnue par le PC comme un pad Xbox. Je n’ai pas testé, mais ça marche bien paraît-il. Voilà, GTAV en ultra sur les WC, c’est possible.
La version officielle de Retroarch pour Switch, avec tous ses cores, couvre un bon panel des consoles habituellement émulées. D’autres émulateurs de bonne qualité viennent compléter l’offre, comme pFBA (arcade) ou pSNES. D’après mes tests, tout tourne parfaitement jusqu’aux consoles 16-bit et jeux arcade 2D avancés. Ainsi, Street Fighter III 3rd Strike tourne full speed avec pFBA, alors que ce n’était pas le cas sur PS Vita avec le même émulateur. Le reste m’intéresse moins donc je n’ai pas testé, mais d’après ce que j’ai lu, la PlayStation tourne correctement elle aussi, et la N64 a connu de forts progrès récemment avec l’arrivée de la recompilation dynamique.
Pour avoir testé pas mal de plateformes d’émulation portables, la Switch s’impose directement comme l’une des toutes meilleures. La résolution de l’écran permet d’avoir le ratio 4/3 d’origine, sans que le filtre soit trop dégueulasse. De plus, par sa versatilité, la Switch permet de pratiquer confortablement tous les shoots verticaux arcade, avec l’écran en vertical. Du bonheur.
Bon, impossible de tous les lister, mais pour faire vite, on va dire que tous les jeux et applications homebrew habituels sont là : un media player, Doom 1 à 3, Quake 1 à 3, Duke Nukem 3D, Prince of Persia, Tomb Raider, etc. J’ai moi-même porté un de mes jeux de logique sur Switch : ça s’appelle SlitherlinkNX.
Eh oui, quand on passe du côté obscur, il n’est plus possible de mettre à jour sa console officiellement, ce qui veut dire que les jeux futurs ne se lanceront plus. Néanmoins, une application permet d’installer n’importe quel firmware sans brûler d’e-fuse, ce qui veut dire qu’on garde aussi la possibilité de downgrader.
Il faut bien en parler, car ça reste la raison principale pour laquelle les gens hackent leur Switch. Sans rentrer dans les détails, je dirais qu’une fois la console hackée, il est extrêmement facile de pirater des jeux commerciaux. Ils se téléchargent en format NSP (eShop) ou XCI (cartouche), et peuvent être installés sur la machine par un homebrew. Un des custom firmwares supporte même les disques durs externes. Ensuite, c’est comme si on avait le jeu officiel. À part le online, il n’y a aucune restriction. Bien sûr, c’est valable aussi pour les mises à jour et les DLC, tout est disponible.
Pour l’instant, je n’ai pas l’impression que le piratage atteigne encore le grand public, en tout cas pas dans les proportions qu’a connue la DS par exemple. D’une part, car seules les consoles datant d’avant l’été 2018 sont hackables pour l’instant. D’autre part, parce que le hack nécessite une petite manip’ (faire contact entre deux pin dans le connecteur du Joy-Con), pas compliquée, mais pas non plus à la portée de tous. Par contre, il existe des solutions payantes clé en main, où tout ça devient très simple. C’est probablement de ce côté-là que la propagation du piratage de masse passera, si ça arrive un jour. Reste à voir si le nouveau hardware de Nintendo va résister longtemps aux hackers, dans le jeu habituel du chat et de la souris.
Hacker sa Switch ou pas, tout dépend de vous. Déjà, il faut avoir une console compatible. Ensuite, c’est un arbitrage à faire, qui dépend de chacun : êtes-vous prêt à abandonner la garantie et surtout le jeu en ligne, à bidouiller un peu parfois, pour avoir accès aux merveilles du homebrew ? Il faut savoir aussi qu’il y a un petit ticket d’entrée. C’est-à-dire que pour se plonger dans le homebrew en sachant à peu près ce qu’on fait, il faut acquérir un certain nombre de termes, de connaissances, écumer les forums… La scène évoluant très vite, il suffit de lâcher quelques mois pour être largué. Après, rien n’oblige à être au courant de tout non plus, et puis il y a toujours la solution payante pour ne pas trop s’embêter.
À titre personnel, je trouve que ça vaut grave le coup. Il faut dire que je ne joue jamais en ligne, que je pratique pas mal les émulateurs en nomade, et que je développe un peu. Le choix était donc vite fait. Ce qui me dérange le plus, c’est la difficulté à acheter des jeux officiellement sur l’eShop, une fois qu’on a passé le cap. À vouloir trop bannir les gens sans distinction, Nintendo empêche certaines personnes de continuer à acheter des jeux. Ça peut se comprendre, mais c’est dommage, il y avait sûrement quelque chose de plus intelligent à faire. Quand il est plus pratique de pirater que d’acheter, c’est qu’il y a un problème quelque part. Ou alors, il faut être riche, et acheter deux Switch.
Dans tous les cas, si vous avez des questions, il y a un topic dédié sur le forum du Dojo, où je répondrai du mieux que je peux.
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