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Les Archives de Cranky – Les jeux Free Radical
La ressortie de Goldeneye sur le Nintendo Switch Online + Pack Bourgeois Additionnel : Definitive Edition, c’est l’occasion de se poser une question bien légitime : après un tel succès, qu’est-ce c’est-y qui zont fait, les devs ?
« Ben Perfect Dark, ducon ! »
Eh bien, chers lecteurs, aujourd’hui, nous apprendrons que cela n’est pas tout à fait vrai.
En février de l’an de grâce 1999, quelques membres de Rare ont quitté le studio pendant le développement de Perfect Dark pour fonder Free Radical Design, et bosser sur leur premier jeu : TimeSplitters. Ce FPS très arcade dans l’âme, sorti sur PlayStation 2 en fin d’année 2000, pose les bases de l’univers de ce qui deviendra une série : des extraterrestres éponymes foutent le bordel dans l’histoire de l’Humanité grâce à leur capacité à voyager dans le temps, et c’est à vous de les dézinguer avec les pétoires disponibles à chaque époque qu’ils ravagent.
Si le jeu tient plus du prototype qu’autre chose, il contient l’ADN de la série, à savoir des flingues, du fun, et de l’humour bien gras. Et comme nous allons le voir dans cette rétrospective des jeux de Free Radical, ses développeurs aimaient particulièrement les flingues, le fun, et l’humour bien gras.
Édité par Eidos Interactive, et sorti en 2002 sur GameCube, PS2 et Xbox, TimeSplitters 2 fait simplement tout mieux que son aîné, à commencer par une mise en contexte un peu plus étoffée de son aventure ! Effectivement, TimeSplitters premier du nom n’avait en guise de mode solo qu’une série de missions demandant de faire un aller-retour entre un point A et un point B pour récupérer un objet particulier, le jeu vous envoyant une bonne plâtrée d’ennemis à votre retour. Pas la moindre accroche, pas la moindre petite cinématique pour vous donner l’envie de découvrir ce petit monde pourtant bien barré (même pas un petit pitch dans le mode d’emploi, c’est dire !). Eh bien, TimeSplitters 2 renomme son mode solo « mode histoire », et c’est visiblement ce dont il avait besoin. On est directement accueilli par une introduction se déroulant en 2401. La guerre de l’Humanité contre la race d’aliens TimeSplitters est sur le point d’être perdue, car ces gredins s’attaquent désormais à notre passé, détruisant la trame de notre histoire grâce à de mystérieux cristaux temporels. Le sergent Cortez, un Vin Diesel en puissance, et le caporal Hart, badass rousse au bras mécanique, sont envoyés en mission commando pour récupérer les cristaux, réparer les méfaits des TimeSplitters dans le passé, et les arrêter une bonne fois pour toute !
Ce mince fil rouge guidera la progression au cours des différentes missions de ce mode histoire, qui consisteront toutes à récupérer un cristal du temps et s’échapper par le portail temporel pour le ramener en 2401, tout en complétant divers objectifs liés à l’époque de la mission. Ainsi il faudra sauver des vierges sacrificielles à Notre-Dame de Paris, libérer la shérif d’une petite bourgade en plein Far West, photographier les preuves des méfaits d’un cybergang à NéoTokyo… Le tout étant modulé par le niveau de difficulté : les missions seront courtes en facile, seront agrémentées de nouveaux lieux et d’objectifs facultatifs en normal, objectifs qui deviendront obligatoires en difficile. Les niveaux sont relativement linéaires, tous très vraisemblables, et même si le mode difficile a tendance à vous submerger d’adversaires qui réapparaissent à l’infini, ce mode histoire reste plaisant dans l’ensemble. Rien de très révolutionnaire : vous n’aurez pas de cutscenes ailleurs qu’au début de la mission, les scripts qui la ponctuent sont très basiques, mais si un bel effort a été fait pour ce solo, l’intérêt du jeu réside ailleurs (même si vous pouvez chopper trois mini-jeux très cools dedans, dont un snake).
Le gros du jeu, c’est bel et bien son mode arcade, divisé en arcade perso et ligue arcade. Ce dernier correspond à des défis tous plus crétins les uns que les autres, et permet de débloquer la majorité des niveaux, personnages et modes de jeu. Et croyez-moi, il y a beaucoup d’occasions de s’écrier « Kamoulox ! » devant tous les petits scénarios qui introduisent chacun des défis. Ils seront également l’occasion de vous initier aux différents modes de jeu, comptant les classiques matchs à mort, capture de sacs, roi de la zone, etc., mais aussi des inédits à TimeSplitters 2, comme le gladiateur, où seul le joueur ayant le titre peut marquer des points (il faudra donc l’abattre pour devenir soi-même le gladiateur), ou contact, un jeu de chat avec des participants enflammés. La palme revient néanmoins au mode assaut, disponible dans trois niveaux, qui recrée carrément une mini-campagne où l’équipe en attaque devra remplir trois objectifs précis pour remporter la victoire.
Entre deux séances de décapitation de zombies, vous pourrez vous détendre en participant à des sessions d’arcade perso, le multijoueur de TimeSplitters, et son orgie de personnalisations diverses et variées. Vous voulez des niveaux ? Check ! Vous en avez 16 à votre disposition, la plupart inédits à cet épisode, d’autres récupérés du précédent. Et si jamais ça n’est pas assez pour vous, il existe un éditeur de niveaux assez complet sur lequel votre serviteur a passé bien trop de temps de sa courte vie. Des personnages originaux ? Double check ! Entre le pain d’épice, l’homme-canard, le robot-poisson et le prêtre zombie, vous trouverez bien chaussure à votre pied dans cette ribambelle de joyeux drilles et voluptueuses demoiselles. Les armes, alors ? Triple check ! Avec un arsenal de SF qui côtoie les vieilles winchesters, les colts, ou encore les briques et les mines de proximité, les combinaisons sont nombreuses. Bon, et la musique ? Quadruple check et tiercé gagnant ! En plus de musiques qui déchirent et habillent parfaitement l’ambiance de chaque époque, concoctées avec goût et un poil d’eurodance par Graeme Norgate, le jeu se permet en plus de mettre à disposition l’entièreté de la bande-son du premier TimeSplitters !
Bref, vous l’aurez compris, TimeSplitters 2 un jeu qui déborde de générosité pour peu qu’on aime se foutre sur la yeule à grands coups de fusil à plasma et autres tommy guns, une dans chaque main de préférence.
Édité par Codemasters, et sorti le 3 septembre 2004 sur tout le monde et son chien (sauf Windaube, faudra attendre 2005), Second Sight est un jeu de tir à la troisième personne qui prend un virage à 180 degrés par rapport aux précédentes productions de Free Radical. On se marrait bien dans TimeSplitters, hein ? Ici, c’est très très sérieux : on parle de conspiration, de flashbacks dramatiques, d’expérimentations immorales, et on se permet même des retournements de situation. Vous incarnez John Vattic, un docteur en on-ne-sait-pas-trop-quoi, passablement esquinté lors de son arrivée au centre médial constituant le premier niveau du jeu. John est atteint de scénarite aigüe, sous la forme d’une amnésie carabinée, et doté de mystérieux pouvoirs psychiques qui s’éveillent en lui à mesure que vous avancerez dans l’histoire. Évidemment, nous sommes dans un jeu vidéo, donc au lieu de prendre sa morphine et faire un bon somme, notre Johnny cherche à comprendre ce qu’il lui arrive, et, en glanant des bribes d’infos çà et là, va petit à petit revivre les évènements traumatiques qui l’ont mené à sa situation actuelle, grâce à des flashbacks situés 6 mois dans le passé.
La campagne va donc alterner entre les analepses d’une opération militaire qui a été à priori désastreuse, et le présent où John Vattic tente de retrouver ses camarades pour apprendre la vérité, chacune de ces deux périodes temporelles apportant l’une à l’autre pour faire avancer l’histoire. Comme je l’ai dit plus haut, ici point de galéjade ni grivoiserie, John a vécu un véritable enfer et essaie de s’en sortir comme il peut. Malheureusement, si les péripéties sont dramatiques, l’écriture faiblarde, la patte graphique un peu caricaturale typique de Free Radical, et de manière générale la mise en forme bancale du jeu n’aide pas vraiment à prendre le scénario au sérieux. Pourtant il repose sur un twist plutôt finaud, oserai-je dire méta si on s’y attarde un peu. Rien n’y fait, la mayonnaise prend difficilement, et le gameplay pataud n’aide pas à avancer dans le monde un chouïa trop dark de Second Sight.
Comment ça se contrôle, ce TPS ? Vous avez la gâchette L pour viser, R pour tirer. John Vattic va automatiquement verrouiller la cible la plus proche, et passer de cible en cible si vous bougez le stick C horizontalement. Le verrouillage se fait à mi-hauteur d’homme, il faudra donc incliner légèrement le stick C vers le haut pour tenter le headshot. Le bouton A sert à effectuer des actions contextuelles, le bouton B fera s’accroupir John. Enfin, le bouton Z permet de se mettre à couvert en rasant les murs. Une fois dans cet état « à couvert », L permet de se mettre à découvert pour viser, tandis que le stick gauche fera se déplacer le doc Vattic le long de la paroi. Sur le papier, ça l’air sympa, en pratique, vous allez passer votre vie accroupi tant ce système de couverture est rigide. À côté de ça, John est plutôt dégourdi, et sait faire un peu de grimpette, se suspendre aux rebords, ramper dans des conduits… Vous n’aurez que trop peu d’occasions de mettre tout ça en pratique, mais ça existe. Pour ce qui est de l’armement disponible, c’est assez maigre : quelques pistolets, une mitraillette, deux fusils d’assaut, un à pompe, un sniper, et deux variations de pistolet tranquillisant, pour les plus non-létaux d’entre vous. Et le ressenti des armes est proche du zéro… Par contre, niveau pouvoirs, John Vattic a accès à des options bien plus intéressantes ! Son premier pouvoir est la télékinésie, ou plutôt le couteau suisse, qui permet de faire tout un tas de choses parmi lesquels activer des mécanismes à distance, casser des caméras de surveillance, rapporter des objets hors d’atteinte, et même faire léviter vos ennemis. L’envoûtement permet de convaincre les êtres vivants aux alentours que John n’existe pas, la projection de passer outre certains dispositifs de sécurité et de prendre le contrôle des méchants, la guérison… vous guérit. Surprenant. Et l’impulsion psychique permet d’envoyer une onde de choc. Le seul hic, c’est que vous ne pouvez utiliser les pouvoirs et les armes en même temps, vous allez donc souvent soit la jouer fine avec les capacités parapsychiques, soit y aller bourrin avec les pétoires.
Le gameplay met l’emphase sur l’infiltration. Enfin, l’infiltration des jeux vidéo des années 2000, c’est-à-dire un peu bidon sur les bords (« C’était quoi, ça ?! … Oh, sûrement un rat. »), mais l’arsenal de pouvoirs de John Vattic permet de rendre ce gameplay valide et assez distrayant selon les niveaux. Un soin particulier a été apporté à certains détails : les PNJ remarquent souvent quand tel ou tel élément n’est pas à sa place, et rallument les caméras de surveillance que vous avez désactivé, par exemple.
Second Sight était une belle tentative de la part de Free Radical de se renouveler : le jeu a de bonnes idées, un scénario plutôt intéressant, surtout par rapport aux productions de l’époque, mais son gameplay brouillon et son exécution maladroite l’empêchent de réellement briller.
Ou l’imparfait du futur. Sorti en 2005 et édité par Electronic Arts (sombre présage…), toujours sur les mêmes consoles, TimeSplitters : Future Perfect se présente comme un FPS un peu plus « moderne », tout du moins dans son mode histoire. Cette fois-ci, un sergent Cortez esseulé revient de sa mission avec les cristaux temporels, pour repartir dans le temps afin de les détruire à la source, et poursuivre un mystérieux voyageur spatio-temporel. Finies les missions avec des objectifs secondaires, ici on file droit, on regarde les jolies scènes scriptées, on bute des mecs, et rebelote. Sur le papier, ça n’a pas l’air très excitant, mais manette en main, force est d’admettre que ce mode histoire est mieux réussi que celui de son aîné : c’est très linéaire, c’est pas toujours très original, mais le gameplay est bon et l’humour saupoudré sur le tout fait que cette nouvelle campagne se joue encore très bien aujourd’hui.
Les niveaux suivent un schéma qui se répète un peu trop souvent : le sergent Cortez rencontre un personnage de l’époque, l’aide parce que ça l’arrange aussi, le personnage doit faire un truc, Cortez continue seul et, voyage dans le temps oblige, rencontre son lui du turfu, séquence de gameplay où l’un doit protéger l’autre, Cortez du turfu s’en va, Cortez du présent prend sa place, re-séquence de gameplay où l’autre doit protéger l’un, on récupère le coéquipier du début et c’est fin de la mission. Il y a peu de variations autour de ce schéma, et si les séquences à deux Cortez (et parfois plus) sont sympathiques au début, ça sent un peu trop le recyclage à certains moments. Un effort a tout de même été fourni pour varier au maximum le gameplay, avec des séquences de rail shooter, de petits casse-têtes (niveau CM2), et des véhicules à conduire, tant bien que mal, dont un chat télécommandé. Parce que pourquoi pas, après tout. Les personnages que vous rencontrez au fil de l’aventure sont tous parodiques à souhait, et les niveaux parcourus ne manquent pas de charme, même si on est loin du dépaysement total que constituaient le Far West ou la jungle aztèque de TimeSplitters 2. Enfin, l’aventure de Cortez sera régulièrement ponctuée de cinématiques très réussies, bourrées de l’humour qui caractérise Free Radical. Bon, même si le coup du garde ivre qui dit n’imp, c’est un peu lourd la dixième fois.
Hélas, le mode arcade pâtit un peu du soin supplémentaire apporté au mode histoire, avec une ligue arcade bien moins fournie en défis que sur TS2. Les niveaux sont par contre bien plus ambitieux, et l’occasion de détourner encore quelques autres films qui n’auraient pas eu droit à leur pastiche dans la campagne. Vous pourrez donc canarder vos cyber-singes/bonhommes de neige/[insérer le nom d’un autre personnage farfelu] en pleine guerre du Vietnam, dans un hôtel hanté, dans le metaverse un monde virtuel à la TRON, ou bien un temple perdu, il y en a pour tous les goûts. À l’exception de trois d’entre eux issus des jeux précédents, tous les niveaux de Future Perfect sont inédits, en plus d’avoir un excellent level-design. Et comme d’hab, si ça n’est pas assez, l’éditeur revient dans une forme encore plus poussée, qui, avec l’exploitation de bugs bien connus de la communauté, permet de faire de petites merveilles. Pour ce qui est de l’arsenal à votre disposition, il est certes devenu plus restreint en termes de « représentation temporelle », mais il est bien plus varié pour ce qui est des types d’armes différents. Je regrette la disparition du lance-grenades si cher à mon cœur, mais ce n’est rien par rapport aux coupes qu’a dû subir la bande-son (transition de qualité). En effet, ce TimeSplitters n’est pas fourni avec la musique des deux premiers jeux, et même s’il a de bons morceaux d’eurodance et parfois des musiques d’ambiance très réussies (et une reprise de la marche funèbre de Marie II d’Angleterre qui n’a rien à envier à la version d’Orange Mécanique), l’ambiance sonore s’en retrouve immanquablement moins variée par rapport aux ainés.
Malgré tout le mal que j’ai pu en dire, TimeSplitters : Future Perfect est la digne suite à TimeSplitters 2. Certes, son moteur graphique commençait à montrer son âge déjà à sa sortie, certes le jeu porte les stigmates d’un développement un peu court par rapport à son ambition gargantuesque (et sa localisation française intégrale n’a d’intégrale que le nom), mais c’est un excellent FPS qui ne dépareille pas dans la ludothèque des classiques de la GameCube.
C’est ici que nous arrêtons notre rétrospective des jeux Free Radical Design. Que faut-il en retenir ? Deux excellents FPS frénétiques, parfaits pour le multijoueur, et un TPS assez médiocre. Ironiquement, chacune de leurs réussites partage le même univers complètement décalé, tandis que leurs productions moins glorieuses sont particulièrement serious business. Cela se confirmera avec Haze, un FPS sorti en 2008 sur PlayStation 3, jeu qui connaîtra un échec retentissant alors qu’il était qualifié avant sa sortie de potentiel « Halo killer » par la presse anglophone. En même temps, c’était édité par Ubisoft. Et Ubisoft, ben… c’est Ubisoft.
Suite à cette déconfiture, Free Radical Design fermera ses portes, et sera finalement absorbé par Crytek en 2009, devenant Crytek UK, qui n’est crédité que sur 4 jeux, dont deux Crysis.
Un potentiel TimeSplitters 4 avait été annoncé en 2007, mais semblait être perdu dans les limbes jusqu’à une annonce récente, en 2021, de la renaissance de Free Radical Design et le reprise du développement de cette suite tant attendue, sous l’égide de THQ Nordic. Il nous reste donc juste à attendre… Sinon, THQ, c’est possible d’avoir un TimeSplitters 2 & 3 HD, pour tuer le temps ? :’)
Par Jean-Fulgence
Le 18 février 2023 | Catégories : Editos
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