Je m'attendais à ce que ça marche du 1er coup
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Les Mario à la con : Super Mario Bros. Special
Pour fêter la sortie de Super Mario Odyssey, le Dojo revient sur « les Mario à la con » : ces épisodes obscurs mettant en scène la célèbre mascotte, dans le cadre de jeux promotionnels, licenciés, éducatifs, ou juste insolites, mais tous officiels.
Previously, on « Les Mario à la con » :
Quel est le deuxième épisode jamais sorti dans la série des Super Mario Bros. ? À cette question, on a envie de répondre Super Mario Bros. 2 version japonaise, en 1986. Ça paraît logique. Eh ben c’est raté ! Le deuxième épisode dans cette série n’est même pas un jeu Nintendo. Il s’agit de Super Mario Bros. Special, sorti en 1986 lui aussi, mais quelques mois avant SMB2J. Tout comme Punch Ball Mario Bros. et Mario Bros. Special, il s’agit d’un jeu Mario développé et édité par Hudson Soft sous licence Nintendo, pour les micro-ordinateurs japonais PC-88 et Sharp X1. Et là tout de suite ça rigole plus, car cette fois, Hudson s’attaque à un gros morceau, la vraie star de Nintendo : Super Mario Bros., et non plus le jeu d’arcade Mario Bros.
D’emblée, cela pose un petit soucis. Sur le plan technique, la principale caractéristique de Super Mario Bros. est d’avoir un scrolling rapide et parfaitement fluide, ce qui était remarquable à l’époque. C’est l’accélération hardware de la NES qui rendait cela possible. Néanmoins, ces micros 8-bits n’embarquent pas de tels composants, ce qui rend difficile voire impossible d’afficher des animations et un scrolling fluides dans les jeux. Hudson est donc contraint de supprimer le scrolling, tout simplement ! Eh oui, ça peut choquer, mais Super Mario Bros. Special se déroule dans des écrans fixes, qui changent lorsque Mario atteint une des extrémités. En pratique, cela veut dire qu’on doit souvent sauter dans le vide en aveugle, sans voir ce qu’il y a à droite, en espérant que ce n’est pas un trou. La transition entre deux écrans est brutale sur PC-88, mais un peu plus fluide sur la version Sharp X1, techniquement supérieure. Dans cette version, les écrans sont toujours fixes pendant l’action, mais il y a un petit scrolling pour passer d’un écran à l’autre, un peu à la manière du premier The Legend of Zelda.
Outre le scrolling, ce qui interpelle immédiatement, ce sont aussi les couleurs. La version PC-88 affiche seulement quatre couleurs (alors que l’ordinateur est capable de huit), avec du tramage pour simuler les autres. De plus, le bleu n’est pas utilisé dans les sprites, pour permettre la transparence. Au final, on a l’impression étrange qu’un filtre jaune / orange un peu dégueu a été appliqué sur le jeu. Là encore, la version X1 s’en sort mieux, sans pour autant égaler la NES. Cette teinte orangeâtre est une des caractéristiques principales de Super Mario Bros. Special, et contribue fortement à lui donner sa personnalité si singulière. Je préfère donc privilégier la version PC-88 pour les captures de cet article.
Là encore, Super Mario Bros. Special n’est pas un simple portage de Super Mario Bros., sinon c’est pas drôle. C’est un tout nouvel épisode, construit sur les bases du premier, mais avec des niveaux inédits, et même de nouveaux ennemis et power-ups. En fait, Special apporte plus de nouveautés à la formule que SMB2J lui-même ! Le soucis, c’est qu’à peu près tout ce qu’il entreprend est un échec. Tout d’abord, la physique change, et pas pour le mieux : Mario perd en inertie, ses mouvements semblent plus hachés, et globalement beaucoup moins agréables. La musique ressemble à une version bourrée de l’originale, avec un tempo plus lent et irrégulier. L’animation est saccadée et clignotante, ce qui n’est pas une surprise compte tenu des limites techniques de la plateforme. Et je ne parle pas des nombreux bugs, dont certains bloquants (genre, la ROM doit être patchée pour ne pas se retrouver coincé).
Mais c’est peut-être sur le level design que Super Mario Bros. Special se démarque le plus. À la perfection de Nintendo, Hudson oppose une conception des niveaux beaucoup plus chaotique, pour ne pas dire carrément brouillonne. Les éléments semblent être agencés sans qu’il y ait vraiment de sens, ludique ou pédagogique. Par exemple, un tuyau, anciennement Warp Zone, ne mène tout simplement à rien : si on l’emprunte, on se retrouve alors bloqué dans un endroit fermé, et on peut juste attendre que le chronomètre s’écoule pour mourir et recommencer. Oui, on en est là. Ce genre de trucs serait impensable dans un titre Nintendo, et fait immédiatement penser à un jeu inachevé, ou bâclé. Il y a tellement de choses étranges dans ce jeu : après le drapeau de fin de niveau, Mario n’avance pas tout seul vers le château, il faut y aller soi-même. Certains blocs invisibles sont placés juste avant un grand saut, exprès pour punir le joueur gratuitement. Parfois, il y a même des pseudo-énigmes, où il faut faire apparaître une plateforme en effectuant une action deux écrans plus tôt, qui n’a rien à voir. Bizarre, étrange, brouillon, c’est vraiment l’impression qui domine tout au long du jeu.
J’évoquais plus tôt des éléments nouveaux, dans les ennemis et les power-ups. En fait, certains ennemis sont importés de Mario Bros., comme le crabe, la mouche, ou le bloc de glace. D’autres viennent plutôt de Donkey Kong : la boule de feu, ou le tonneau. Quant au nouveaux power-ups, en plus des habituels, il y a :
En vidéo :
Scrolling, maniabilité, level design, musique : Super Mario Bros. Special s’applique à prendre toutes les qualités de l’original, et à les rouler dans la boue. C’est sans aucun doute un mauvais Mario, voire un mauvais jeu tout court. Cependant, il demeure fascinant à observer, dans l’étrangeté et la bizarrerie qu’il dégage. Pour le coup, c’est un vrai « Mario à la con » : oublié, mauvais, mais tellement intéressant. Super Mario Bros. Special, c’est un peu comme si le copain bourré de Léonard de Vinci avait gribouillé à la va-vite sa propre Joconde sur un bord de table, lors d’une soirée entre potes. Il ose réinterpréter un chef-d’œuvre en profondeur, sans complexe, mais sans talent.
Par Tardigrade
Le 30 octobre 2017 | Catégories : Editos
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